Après une interruption brutale dans le cadre du confinement, les chantiers de bâtiment et travaux publics vont pouvoir reprendre. Si certains travaux ont cependant pu être exécutés durant ces dernières semaines, la quasi-totalité des chantiers était à l’arrêt en France.

Afin d’encadrer cette reprise et de limiter les risques de propagation du Covid-19, divers textes officiels ou émanant des instances professionnelles ont été rédigés. Sans surprise, l’accent est mis sur les gestes barrières, les distances à respecter et les modalités d’intervention des personnels comme c’est le cas pour les autres professions. Si elles sont strictement respectées, ces dispositions contraignantes et sans doute nécessaires devraient impacter fortement le travail sur chantier pour deux raisons : d’une part, la nature même des modes opérationnels qui ne permettent que très rarement au travailleur d’être isolé et, d’autre part, la présence simultanée des travailleurs d’une même entreprise ou de divers corps d’état. Le temps consacré à la réalisation des ouvrages devrait donc s’allonger pour intégrer les nouvelles procédures à respecter.

Si le monde du bâtiment a pris en compte la dimension sécurité des personnes depuis quelques années et a mieux intégré la formation et la protection au travail, nul n’ignore les difficultés liées par exemple à la mise en pratique des obligations en matière de Coordination sécurité et protection de la santé (CSPS). Rappelons que les entreprises du bâtiment sont en grande majorité de petites entreprises et des artisans, qui doivent souvent intervenir en sous-traitance de grosses structures dans un contexte économique très tendu.

N’oublions pas non plus que le monde du bâtiment souffre déjà de la tendance souvent forte de certains maîtres d’ouvrage à vouloir réduire les prix des travaux et de la maîtrise d’œuvre. Ceci au point d’accepter des offres anormalement basses (OAB) et une forte présence de travailleurs européens détachés. Ceci conduit fréquemment à s’affranchir de règles élémentaires de sécurité jugées superflues et coûteuses dans des logiques supposées de « rentabilité et de gain de temps ».

Qu’en sera-t-il des règles  « Covid » sur les chantiers ? Des textes prescrivant des actions dont il est évident qu’elles seront difficiles à mettre en œuvre permettront-ils dans les faits de garantir la protection de la santé ?

Souhaitons que les valeurs humaines soient mises en avant et que de nouvelles pratiques réalistes prenant vraiment en compte la santé et la sécurité au travail puissent s’engager dans le respect et l’intérêt de tous les acteurs de la construction.

Michel Garcin
Architecte  Urbaniste
Délégué régional AGREPI île-de-France.